Quelle relation entretenez-vous avec la tragédie ?
En plus de la langue, qu’est-ce qui vous a intéressée dans la version d’Iphigénie de Tiago Rodrigues ?
De plus, dès le départ dans le texte de Rodrigues, le théâtre et son subterfuge sont nommés, mis en évidence. Le chœur dit : « rien de tout cela n’est vrai / Mais vous croyez quand même à ce que nous vous disons ». J’aime la liberté que ça m’accorde comme créatrice : la fable est racontée depuis 2000 ans, mais on peut utiliser tous les éléments qu’on veut, essayer toutes sortes de dispositifs pour le faire et voir si la résolution demeure la même.
Je dirais aussi que Tiago Rodrigues met de l’avant une écriture très fine, très subtile. Il ne souligne rien à grands traits. C’est d’ailleurs ce qui fait la particularité de cette adaptation : il y a une certaine distance et rien n’est nommé explicitement, on est dans l’évocation. À certains moments, j’aurais trouvé salvateur que les choses soient dites de manière évidente, frontale, de recevoir une charge directe de la part du texte. Mais ce n’est pas le cas ! Il m’a donc fallu lire entre les lignes et travailler dans la finesse, dans la retenue.
Quelle est pour vous la question centrale de cette pièce ?
Au final, je me dis que ça prend du courage aussi d’accepter que la fin ne change pas. C’est ça, le tragique. Si on ne peut pas sauver Iphigénie, il faut au moins faire en sorte de dénoncer. D’hier à aujourd’hui, des milliers d’Iphigénie ont été sacrifiées dans d’innombrables conflits et je pense qu’on doit continuer de s’élever contre le sacrifice des générations qui nous suivent.